La diminution de l’activité physique, le remplacement de la vie active de l’adolescence par un mode de vie sédentaire, et les repas d’affaires qui succèdent aux repas expéditifs de jadis contribuent insidieusement à l’augmentation du poids corporel chez de nombreux hommes. Ainsi, l’accumulation annuelle de deux kilos peut aboutir à un surplus de vingt kilos après dix ans. Pour certains, c’est une source de souffrance, tandis que pour d’autres, cela ne représente pas une préoccupation majeure. « 80 % des consultations liées à l’obésité concernent des femmes, alors que les hommes sont plus souvent en surpoids et subissent plus de complications, comme des apnées du sommeil, des infarctus ou des problèmes hépatiques, » prévient le Pr Alain Golay, chef du Service d’endocrinologie, diabétologie, nutrition et formation thérapeutique à l’Hôpital universitaire de Genève. « Il est donc essentiel de cibler davantage les hommes dans nos interventions. » Cette inquiétude a poussé la Fondation suisse de l’obésité à mettre en avant la problématique masculine lors de la Journée de l’obésité 2020, le 4 mars. Les statistiques de l’Office fédéral de la statistique sont éloquentes : 51% des hommes suisses souffrent de surpoids ou d’obésité, contre 33% des femmes. La tendance est alarmante : en 25 ans, le taux d’obésité a doublé, passant de 6 à 12% chez les hommes et de 5 à 10% chez les femmes.
Sommaire
Une maladie à part entière
« Il y a de véritables raisons de s’inquiéter, » confirme la Dre Lucie Favre, médecin au Service d’endocrinologie, diabétologie et métabolisme du Centre hospitalier universitaire vaudois. « D’abord parce que le surpoids et l’obésité augmentent considérablement le risque de troubles métaboliques comme l’hypertension, l’excès de cholestérol, le diabète, mais aussi les maladies cardiovasculaires et certains cancers. » Elle ajoute : « L’obésité est en elle-même une maladie. » Une affection chronique inflammatoire complexe, avec de multiples causes et conséquences. La pandémie de COVID-19 l’a clairement démontré, avec une majorité de patients obèses gravement affectés dans les unités de soins intensifs. « Les autorités ont été lentes à le reconnaître, mais c’était prévisible, » réagit la Dre Favre. « On savait déjà que les personnes obèses étaient plus vulnérables et plus sévèrement touchées par d’autres virus comme le H1N1 ou des maladies pulmonaires. »
Une bombe inflammatoire
Le principal ennemi ? La graisse viscérale, qui tend à s’accumuler dans l’abdomen des hommes en surpoids. « C’est une bombe inflammatoire, » affirme le Pr Golay. Contrairement à la graisse sous-cutanée, bien vascularisée, la graisse abdominale est hétérogène et mal irriguée, entraînant des atteintes vasculaires, des nécroses et une inflammation chronique, prédisposant à diverses pathologies et aggravant les symptômes en cas d’infection.
« La société évolue vers une moindre stigmatisation des personnes en surpoids, ce qui est positif, » analyse la spécialiste. « Cependant, il serait risqué de banaliser l’obésité, car elle n’est pas un état de bonne santé. » Bien que l’Organisation mondiale de la santé reconnaisse l’obésité comme une maladie, ce n’est pas le cas en Suisse, où les soins liés à l’excès de poids ne sont remboursés que s’ils entraînent des complications, un point que de nombreux experts, comme le Pr Zoltan Pataky, trouvent aberrant : « C’est une question de temps avant que les problèmes ne surviennent. »
La non-reconnaissance par les assurances
Derrière cette non-reconnaissance, il y a des enjeux économiques et politiques. « Le message implicite est clair : ‘Mangez moins, bougez plus, et tout ira bien.’ Mais l’obésité n’est pas un choix, et elle ne se résout pas simplement par des injonctions. Elle est le résultat de nombreux facteurs liés à la vie personnelle et à notre société, » déplore la Dre Favre.
« Beaucoup peut être fait au niveau du cabinet médical, » estime le Pr Pataky. « Discuter du poids, même si la prise n’est pas spectaculaire, et aborder la santé sexuelle, souvent révélatrice chez les hommes, sont essentiels. » Il ajoute que des traitements existent pour les nombreux problèmes découlant de l’obésité, et que plus la prise en charge est précoce, moins les interventions nécessaires sont lourdes. « Comprendre pourquoi on mange trop et pourquoi on bouge peu est aussi crucial que la solution ‘manger moins et bouger plus’. La perte de poids commence souvent dans la tête… Et même une perte modeste peut avoir des effets significatifs sur la santé cardiovasculaire. »
* Le surpoids et l’obésité sont définis selon l’indice de masse corporelle (IMC).
IMC = poids (kg)/taille (cm)2. Le surpoids est défini par un IMC entre 25 et 30, et l’obésité par un IMC supérieur à 30.
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